Dispositif de gratification au covoiturage régulier
Alternative à l'autosolisme pour permettre de limiter les pollutions qui lui sont liées en réduisant le nombre de voiture sur les routes par optimisation taux de remplissage ; offrir une offre de mobilité économique là où le TC fait défaut ; limiter l'accidentalité.
Le caractère innovant du projet réside dans l'ambition donnée : offrir un mode de mobilité gratuit pour les passagers, pour une expérimentation de minimum 3 ans, sur un périmètre large.
C'est surtout ce dernier point, l'échelle territoriale minimum à laquelle les collectivités partage un dispositif commun (opérateur ET modalités), qui permet une promotion efficace auprès des usagers, et donc le changement de comportement ( l'échelle départementale semble le minimum pertinent pour un dispositif efficace).
➔ Le succès du projet a donc résidé en une coopération tacite entre les collectivités de Savoie pour utiliser le même opérateur et les même modalités, afin de faciliter la lecture usagers et lancer une campagne d'ampleur. Personne n’a porté pour les autres, pas de contrat, accord de manière informelle.
Comment le projet fonctionne ?
Via l'application Blablacardaily, les modalités s'appliquent à l'ensemble des trajets de 5km à 80 km, effectués en Savoie (donc dont l'origine et la destination sont en Savoie) :
- rémunération du conducteur à condition de 0,10 centimes par kilomètre et par passager transporté, plancher 1.5€ (de 5 à 15 km), plafond 3€ (de 30 à 80km),
- gratuité pour le passager : c'est la collectivité d'arrivée qui prend en charge le trajet.
A cela s'ajoute un suivi précis des covoiturages effectués (trajets, distances, taux de remplissage), grâce à la technologie du Registre de Preuve de Covoiturage (RPC) et de BlablaCarDaily, assisté également par l'Agence écomobilité Savoie Mont Blanc qui nous accompagne sur le reporting, la conduite de projet, la communication et l'animation.
Genèse : avant tout, nous avons fait bcp de communication sur le covoit en général en Tarentaise (dès 2022) dont bien-sûr Mov’ici :
En Tarentaise, plusieurs Communautés de communes très volontaires, la communication Mov’ici était bien diffusée, des supports supplémentaires était créés (vidéos, supports numériques...). Puis le département 73 et les 3 collectivités de métropole Savoie (Montmélian, Chambéry, Aix-les-bains) partent avec BlablacarDaily en janvier 2023. Avec les autres territoires de Savoie (SMAPS , Arlysere, APTV et SPM), nait donc la volonté et le besoin de raccrocher les wagons.
On récolte donc, grâce au RPC, le détail des trajets covoiturés via plateforme sur le territoire : récupération des données sur les 4 dernières années, par opérateur. Résultats en Tarentaise : environ 95% de Blablacardaily, 5% de Klaxit (racheté par Blablacar depuis) et moins de 0,5% de Mov’ici. Le RPC est superbe outil de suivi, très quali, qu’il faut exploiter à fond.
Le choix de l’opérateur paraissait sans appel, pour garantir le succès du projet : il fallait absolument se mettre du point de vue de l’usager et choisir ce qui était déjà massivement utilisé et déjà gratifié dans les grandes agglomérations du département, pôles générateurs de flux jusqu'au bout des vallées.
Bien sûr, nous avons la grande chance d’avoir été chapeautés par l’Agence écomobilité Savoie Mont Blanc, une SPL qui travaille sur la transition des mobilités sur les 2 Savoie. La Région nous a également aidé en autorisant le développement du projet par des délégations de la compétence "mobilités partagées" aux comcom, non AOM.
Quels sont les usagers concernés par le projet ?
Toutes les personnes effectuant un trajet dont l'origine et la destination sont en Savoie (qu'elles soient habitantes ou non, travaillant ou non, etc.)
Quels sont les clefs de réussites et les leviers facilitateurs du projet ?
2 ans après le début du projet, s’il ne fallait garder que 3 conseils pour vous lancer:
- S’adapter à la pratique qui existe déjà sur sont territoire pour choisir son opérateur,
- Être ambitieux (gratuité passagers, expérimentation de mini 3 ans, mettre le paquet sur communication et animation),
- Et surtout voir ce que font les voisins car une échelle mini départementale parait le minimum pertinent pour un dispositif commun.
Il nous semble important de maintenir un regard vigilant sur le détournement des usagers du Transport en Commun vers le covoiturage. Aussi, à propos de l’argent public global investi dans le covoiturage en général, depuis le plan national covoiturage et même avant, on estime un coût de la tonne de CO2 économisée vraiment très lourd par rapport aux autres politiques de mobilités.
➔ Voir le rapport de Bruno Cordier de l’ADETEC « aides publiques au covoiturage » à ce sujet, très intéressant.
➔ Il convient donc d’une part de différencier les pratiques ; en effet, notre avis est qu’une campagne d’incitation financière locale là où le TC fait défaut est absolument essentielle. On parle donc bien du super levier que représente le covoiturage courte-distance de type régulier, pas du covoiturage longue distance sur lequel nous somme plus réservés (intéressant de lire le dossier de Fabien Ginisty dans le magazine l’Âge de Faire).
➔ D'autre part, on garde à l’esprit qu’avant de donner des résultats sur le volet environnemental, une politique d’incitation au covoiturage est d’abord une action concrète et de court terme qui concerne l’accessibilité d’un territoire, la mobilité solidaire (par définition car gratuit pour les passagers) et la proposition d’une offre de transport là où il n’y en avait pas.
Notre analyse est qu’il faut persévérer de manière ambitieuse (gratuité, échelle la plus large possible d’un dispositif commun, communication et animation) car ce n’est qu’après plusieurs années que l’on peut espérer l’abandon d’un véhicule par foyer, ou encore la venue en Tarentaise sans véhicule pour la saison par exemple ; ce n’est qu’à partir de là que des résultats sur les émissions et la réduction des nuisances, pourront commencer à être probants.