Retour sur la 3ème édition des Rencontres de l'Observatoire du MaaS du 22 janvier 2025

Evènement organisé par le CEREMA et la DGITM en partenariat avec mobil'In Pulse (ex :Atec – ITS France)

Avec le soutien de l’ADCET, la FNTV, SYNTEC Ingénierie et l’UTPF

Ces rencontres ont permis de partager des retours d’expérience de territoires, de présenter les travaux en cours au sein de l’observatoire et d'échanger autour des enjeux de développement des plateformes MaaS publiques.
Retrouvez ci-dessous la synthèse des propos et les présentations de l’évènement !
SommaireSommaire

Introduction

Les rencontres 2025 de l’observatoire ont été introduites par Grégoire Philippon, chef du pôle numérique à la DGITM. 

En préambule ont ainsi été rappelé les objectifs de l’observatoire :

  • Animer un collectif d’acteurs mobilisés sur la thématique du MaaS dans une logique de partage d’expériences et connaissances.
  • Produire des références et des méthodes pour partager  des repères communs.
  • Partager une vision nationale des MaaS développés en France.


Cet observatoire, piloté par le CEREMA et la DGITM, est basé sur une dynamique partenariale avec le concours des acteurs suivants ; Gart, Régions de France, Agir Transport, ADCET, UTPF, FNTV, Alliance des Mobilités, Syntec Ingénierie, la Fabrique des Mobilités et l'Atec-Its France, AOM, opérateurs de transports et acteurs de l'innovation dans le champ de la mobilité.

Ces rencontres de l’observatoire constituent un temps particulier d’échange entre acteurs territoriaux, acteurs publics nationaux, acteurs industriels du numérique, acteurs de l’ingénierie et du conseil et acteurs de l’enseignement supérieur et de la recherche. 

Cette édition 2025 a été organisée en 2 sessions : 

Une 1ère session dédiée aux retours d’expérience de territoires :

  • Le MaaS, un instrument de l'action publique pertinent pour décloisonner les politiques de mobilité ? Le cas du développement de services numériques de mobilité au sein du territoire des Hauts-de-France.
  • Intégration du stationnement et du réseau de bornes de recharge électrique dans la plateforme MaaS de Montpellier Méditerranée Métropole
  • Les enjeux du MaaS du Syndicat Mixte des Mobilités de l'Aire Grenobloise, d'un point de vue organisationnel, technique et vis à vis des usagers.
  • Atoumod : Le post-paiement digital, une brique de distribution complémentaire pour les MaaS régionaux ?

 

Une 2nde  session liée aux chantiers 2024 - 2025 de l'observatoire : 

  • Actualités des groupes de travail de l’observatoire
  • Plateformes MaaS locales : quels enjeux, leviers d’optimisation de la valeur d'usage et des modèles de développement ?
  • Interopérabilité : projets régionaux et nationaux, accélérateurs de la standardisation :
    • Le déploiement de la plateforme CB2D en Région Grand Est.
    • Les travaux de la DGITM en faveur de l'interopérabilité des MaaS 

👉 Le MaaS, un instrument de l'action publique pertinent pour décloisonner les politiques de mobilité ? Le cas du développement de services numériques de mobilité au sein du territoire des Hauts-de-France 

Pierre-André Horth, chercheur au CEREMA-Laboratoire MATRIS, a présenté quelques éléments saillants issus de sa thèse publiée à l’automne 2024. 

A partir d’un rappel de la définition du MaaS selon l’UITP , ont ainsi été présentées plusieurs idées clés : 

  • La combinaison de différents enjeux associés à l’essor du concept de MaaS : économiques, mobilité durable, industriels, et de politiques publiques.
  • Un vaste sujet à la rencontre de deux dynamiques de recherche : la mobilité durable et le numérique.
  • Une littérature scientifique très anglophone et concentrée sur des aspects pragmatiques liés aux sujets d’aide à la décision des modèles d’organisations, aux modèles économiques et à l’acceptation par les usagers.
  • L’enjeu d’introduire une variable spatiale avec une analyse sur des projets concrets sous l’angle de la gouvernance territoriale.

Sur la base de ce cadrage, Pierre-André a présenté son analyse du potentiel du décloisonnement de la mobilité par les services numériques de mobilités appelés MaaS en prenant le cas d’usage du territoire des Hauts-de-France.

Si ce potentiel s’avère bien réel, ce décloisonnement spatial et modal lié aux systèmes MaaS déployés sur les territoires ne s’avère aujourd’hui pas encore concrétisé.

S’il participe à l’effort de décloisonnement par sa finalité même, le MaaS – ou plutôt les MaaS de par la multiplicité des projets portés- entretiennent un certain cloisonnement des politiques de mobilités entre plusieurs échelles territoriales.

De ce constat d’observation, il en ressort d’importants enjeux d’interaction entre les plateformes déployées à différentes échelles territoriales (locales, régionales, interrégionales, nationale, voire transfrontalière. cf région haut de France), interactions à organiser d’un point de vue technique mais aussi et surtout en terme de systèmes de gouvernance.

👉 L'intégration du stationnement et du réseau de bornes de recharge électrique dans la plateforme MaaS de Montpellier Méditerranée Métropole

Après une introduction indiquant que le projet MaaS de la métropole est déployé dans le cadre d’une délégation de services publique confiée à la SPL TaM, Jean Bachmann, coordonnateur Mission MaaS et Services Innovants à la Métropole de Montpellier- Méditerranée, a présenté le projet d’intégration du réseau de 600 bornes de recharge E-totem.

Ce réseau, déployé dans le cadre d’un appel à manifestation d’intérêt en échange d’une convention d’occupation de domaine public sur 15 ans, s’est concrétisé par l’intégration complète en 2024 du service de recharge au sein de l’application M’Ticket TaM.

Ce projet a intégré la gestion d’une tarification particulière liée au Pass gratuité développé par la Métropole pour ses résidents, avec un parcours usager spécifiquement construit au sein de l’application et une gestion mutualisée du SAV.

En complément, Robert Giliotti, directeur du stationnement et des nouvelles mobilités de la TaM a présenté le dispositif de contrôle de stationnement associé au déploiement de ce service. 

Au regard du fait que 80% des bornes déployées sont en zone de stationnement payant, la Métropole et laville de Montpellier ont mis en place : 

  • Une gratuité du stationnement pendant le temps de charge,
  • Un système de contrôle par véhicule LAPI.

Suite à cette présentation ont notamment été évoqués : 

  • les enjeux d’information sur les conditions d’accessibilité des espaces de stationnement associés au bornes de recharge, en conformité avec la réglementation en vigueur,
  • les questions d’exploitation des données d’usages de ce nouveau service déployé,
  • le sujet des conditions d’interfaçage entre le E-totem et la plateforme MaaS et l’usage de standard d’interopérabilité.

👉 Les enjeux du MaaS du Syndicat Mixte des Mobilités de l'Aire Grenobloise, d'un point de vue organisationnel, technique et vis à vis des usagers 

Mélina Christina, Chef de produit MaaS au Syndicat mixte des mobilités de l’aire Grenobloise, a présenté un retour d’expérience sur les conditions de déploiement du MaaS Grenoblois. 

Le SMMAG, engagé sur le sujet depuis 2018, a fait évoluer son projet :

  • à partir de 2021 avec le lancement de M mobilités services,
  • en 2022 : une simplification pour l’usager avec une unique application pour s’informer et accéder aux services (par fusion de l’appli « M mobilités services » et appli « M infos voyageur »),
  • en 2023 : une application unique sur le territoire pour s’informer et accéder aux services dont les transports en commun.

En quelques chiffres, l’Appli M c’est aujourd’hui :

  • + 60 000 comptes
  • +1,8 millions d’ouverture par mois
  • + de 85% des achats en dématérialisés (vs carte Oura)
  • En dématérialisé : 50% étudiants, 30% occasionnels, 10% 11-17 ans, 10% 18-64 ans.
  • ~ 30k validations par semaine.


Les principaux enjeux du projet traités par le SMMAG d’un point de vue organisationnel sont : 

  • La gestion de la complexité du pilotage des moyens autour des 3 lots fonctionnels du projet :
    • l’information voyageur géré par le SMMAG en direct avec ses propres moyens de développement,
    • le compte client, l’intégration des partenaires de mobilité et de la brique paiement confiée à Wordline,
    • l’achat et la vente de titres porté par Airweb en interface avec Conduent pour la billettique embarquée.
  • Le développement de compétences en interne de l’AOM et de l’exploitant sur des dimensions produit, marketing digital, design, etc.
  • La mobilisation de partenaires de mobilité pour une exploitation de qualité du service et une bonne maintenance en condition opérationnelle des interfaces permettant l’intégration des services au sein de l’application.


Plusieurs enjeux sont exprimés sur le plan technique  : 

  • La rationalisation de l’architecture technique de la plateforme pour simplifier sa maintenance évolutive.
  • L’amélioration continue au service de la qualité d’expérience d’usage et de la performance de fonctionnement.
  • Le choix des conditions d’interfaçage de la plateforme avec des tiers (cf. art 28 de la LOM).


Vis-à-vis des usagers, les principaux enjeux auxquels s’attache le SMMAG concernent :

  • La connaissance clients, et l’intégration des retours usagers en continu, depuis la conception d’un service jusqu’à son déploiement grande échelle.
  • La communication pour faire connaitre l’offre de service de la plateforme.
  • La conversion client avec une gestion de la relation usager permettant de convaincre d’essayer puis d’adopter le service. 


Enfin, ont été présentées les futures perspectives du projet et du produit : 

  • Le renouvellement de contrats.
  • L'outillage pour mieux opérer le développement du projet ( ex : design system).
  • La gestion d’une cohérence des services de mobilités intégrés, notamment en termes de tarification.
  • La simplification et l'harmonisation des interfaces usagers.
  • L’animation produit avec le déploiement d’offre promotionnelles, avec une gestion des consentement pour permettre de diffuser des notifications.

👉 Atoumod : Le post-paiement digital, une brique de distribution complémentaire en Normandie  

Gabriel Plouviez , Chef de produit digital – tarification au syndicat mixte Atoumod a présenté l’offre de post paiement (ou paiement à l’usage) déployée en Normandie sur la base de l’application Fairtiq.

L’application de post-paiement FairtiQ se positionne en complément de l’application Atoumod (information voyageur avec calculateur d’itinéraire et information tarifaire) et de l’application M-ticket Atoumod (pré-paiement). 

La solution est aujourd’hui déployée sur les lignes Nomad train (pour les trajets intra-Normandie), lignes Car Nomad 111 et 122 sur les réseaux Twisto de Caen et LiA du Havre ; et prochainement sur le réseau du Cap Cotentin.

D’un point de vue usager, le fonctionnement de l’application repose (après création de compte utilisateur) sur : 

  • La déclaration d’un début de déplacement au moment de monter à bord d’un réseau partenaire, générant la création d’un billet de transport,
  • la possibilité de présenter ce billet en cas de contrôle,
  • la déclaration de fin de déplacement avec génération d’un récapitulatif de déplacement. 


Fonctionnant avec un algorithme de reconstitution de trajets à partir de la géolocalisation, l’application comptabilise les trajets réalisés par jour pour permettre de générer une facture et paiement (système de tarification plafonné à la journée). 

Les objectifs poursuivis dans le cadre de ce projet sont : 

  • Faciliter l’achat de titres de transport en Normandie par une expérience utilisateur simplifiée,
  • Encourager et faciliter la multimodalité /intermodalité par la possibilité d’usage combiné sur plusieurs réseaux,
  • Limiter les interactions avec les infrastructures billettiques qui représentent des couts importants,
  • Mise en place de facilités tarifaires : titre multimodal, capping mensuel.
     

Avec comme cible prioritaire des voyageurs « occasionnels réguliers » et jeunes, l’application peut également s’adresser aux touristes ainsi que pour les déplacements professionnels. 

Les difficultés ou défis auxquels le syndicat mixte Atoumod s'est confronté dans le déploiement de cette solution de post-paiement concernent principalement : 

  • La compréhension et l’adoption par les usagers d’un nouveau mode de consommation des transports en commun, un défi de communication et d’accompagnement.
  • L’intégration des cartes de réduction, un défi d’adaptation aux spécificités des usagers.
  • La bonne connaissance par les usagers du périmètre couvert par la solution, au regard d’un déploiement progressif sur le territoire avec les AO locales, et la limite de l’intra-régional.
  • La juxtaposition d’une application dédiée post-paiement avec une application calculateur d’itinéraires, un défi de de convergence
  • L’intégration d’une application régionale dans le paysage billettique des réseaux urbains qui ont leur propre feuille de route de développement de service aux usager, un défi partenarial.


Enfin, en réaction aux questions sur les capacités de gestion d’une tarification zonale ou kilométrique (possible avec la solution Fairtiq),  Gabriel Plouviez a rappelé l’enjeu de gestion d’un référentiel tarifaire à l’échelle régionale. 

👉 Actualités des groupes de travail de l’observatoire 

Pierre GREAU, Chef de projet MaaS au Cerema, a présenté les différents chantiers en cours au sein de l’observatoire.

Après un travail de révision du modèle de données permettant de caractériser les services numériques de mobilités/ Maas existants, une campagne de mise à jour va être lancée début février 2025. 

Dans le but d’alimenter les travaux de l’observatoire et d’identifier des axes de soutien en appui des collectivités, un chantier collaboratif a été engagé à l’automne 2024 pour travailler sur les facteurs de pérennisation des projets MaaS portés par les AOM locales. 
Sur la base d’une pré-identification d’enjeux et problématiques clés, au sein d’un groupe de travail pluridisciplinaire,  il est prévu d’engager au printemps 2025 une enquête qualitative auprès d’AOM maitres d’ouvrages de plateforme MaaS. 

Jean Coldefy a présenté les objectifs d’un groupe de travail copiloté par Mobil’In Pulse (ex Atec-Its France) et le CEREMA.
Au regard d’un déploiement rapide et d’un véritable succès, l’open-payment présente un potentiel considérable pour les AOM qu’il apparait pertinent d’analyser. 
Le groupe de travail vise la rédaction d’un document pédagogique à destination des décideurs publics sur les enjeux, les potentiels et les freins de la technologie dite open-payment.
Ce groupe de travail, ayant fait l’objet d’une préfiguration, sera ouvert à partir de fin février 2025.

Suite à un travail et une publication réalisée en 2024, le groupe de travail (animé par Frederic Gavel d'Ingerop – Syntec Ingénierie) a décidé d’approfondir les travaux réalisés sous 2 angles : l’intermodalité et verrous/leviers d’intégration de la voiture dans les MaaS (et réciproquement).  

👉  Plateformes MaaS locales : quels enjeux, leviers d’optimisation de la valeur d'usage et des modèles de développement ?

En préambule, Pierre GREAU (CEREMA) a présenté le cadre de réflexion du groupe de travail engagé sur les facteurs d’optimisation des plateformes MaaS territoriales :

  • Près d’une soixantaine de plateformes publiques locales recensées au sein de l’observatoire,
  • Une grande diversité d’approches, de mode de développement portés par les AOM et opérateurs avec des travaux permanents d’enrichissement,
  • Une dynamique de consolidation observée depuis 2021/2022 avec :
    • une montée en compétences des collectivités,
    • un cadre réglementaire de mieux en mieux intégré,
    • des solutions techniques arrivées à un bon niveau de maturité,
    • une avancée des travaux de normalisation et standardisation des dispositifs d’ouverture et partage de données
    • Une progression de l’interopérabilité tant à des échelles locales, régionales que nationale avec l'émergence de briques techniques mutualisée

Mais des projets soumis à différents enjeux stratégiques et opérationnels pour assurer leur pérennisation. 

Le groupe de travail réuni à l’automne 2024 a permis de pré-identifier un ensemble d’enjeux autour de deux dimensions clés contribuant à l’optimisation – pérennisation des plateformes MaaS locales : 

  • Le déploiement de la valeur d’usage
  • L’optimisation du modèle de développement. 

Sur la base de ce 1er travail, le Cerema va prochainement engager une enquête qualitative auprès d’AOM maitres d’ouvrages de plateforme MaaS pour conforter cette analyse d’enjeux et axes d’optimisation par des retours d’expérience. 


Afin d’illustrer la réflexion, quelques questions ont été adressées à Deborah Tourmente, Responsable de projets nouvelles mobilités à la Métropole Rouen Normandie et Jean Bachmann, Coordonnateur Mission MaaS et Services Innovants à la Métropole Montpelier Méditerranée.

Pouvez-vous nous citer un exemple de services de mobilité ayant fait l'objet d'une réflexion particulière en termes d'intégration au sein de votre plateforme ?

Pour la Métropole Rouen Normandie : Il peut notamment être cité le travail réalisé avec un EPCI voisin, la communauté d'agglomération Seine-Eure pour intégrer leur offre de mobilité, aujourd’hui offre TC, (et demain les offres vélos en libre service et transport à la demande). Dans ce cadre, il s’agit de dépasser les frontières des AOM pour pouvoir proposer au sein de l’application my-astuce une offre de mobilité en phase avec les déplacement quotidiens des habitants.

Concernant la Métropole Montpelier Méditerranée : L’intégration des services de mobilité au sein de la plateforme Maas de l’agglomération est sous la responsabilité de la SPL TaM. Dans ce contexte, il peut être cité l’important travail d’intégration de l’offre de services liés aux bornes de recharge électrique déployées dans le cadre d’un appel à manifestation d’intérêt. Dans ce cadre, un choix fort a été fixé d’intégrer de manière exclusive le service de bout en bout au sein de l’appli M-Ticket. 


Quels sont les points sensibles/difficultés rencontrées dans la mise en œuvre de l’intégration des services ? 


2 aspects particuliers sont soulevés sur cette question d’intégration de services de mobilité au sein d'une plateforme MaaS : 

  • La gestion préalable de la gouvernance et des conditions de collaboration entre un opérateur de service de mobilité et l’opérateur de la plateforme numérique : 
    Pour permettre de traiter efficacement les problématiques posées par l’intégration d’un service, il semble important de fixer un cadre de relation.
  • La complexité de gestion des formats de données et modalités d’interopérabilité avec les opérateurs de services : 
    Si les standards de données (ex : GTFS) permettent de gérer un 1er niveau d’intégration pour l’information voyageur, l’intégration plus profonde de services au sein de la plateforme MaaS se heurtent très souvent à des difficultés liées à la spécificité des API (interfaces de programmation d'application) proposées par les différents opérateurs de services de mobilité. « avec chaque partenaire, l’interfaçage va être spécifique et l’on va devoir repartir quasiment d’une page blanche ».

De quelle manière sont intégrés les partenaires dans la gouvernance mise en place dans le cadre du projet ? 


Pour la  Métropole Rouen Normandie, l'organisation de projet est très formelle avec des comités techniques réguliers auxquels sont conviés tous les partenaires. Des ateliers techniques avec chaque partenaire sont également organisés, mobilisant les développeurs pour traiter de manière concrète des aspects très techniques. Des ateliers fonctionnels sont également organisés pour faire des tests de bout en bout.
En complément, il ne faut pas sous-estimer la valeur des liens informels qui permettent au fil de l’eau de débloquer un bon nombre de questions.

Pour la Métropole Montpelier Méditerranée, le délégataire, en tant que « bras armé de la collectivité en matière de mobilité » , était au départ le seul exploitant de services de mobilités intégrés au MaaS. La gouvernance était donc organisée de manière bilatérale entre la TaM et la Métropole 3M. 
Les choses évoluent aujourd'hui, notamment avec le principe de l’appel à manifestation d’intérêt (AMI) lancé pour les bornes de recharge électrique, vers le développement d’une relation tripartite entre le Métropole (commanditaire stratégique), la TAM (Opérateur développeur de la plateforme) et l’opérateur du service de mobilité concerné.
Au delà de cela, il apparait aujourd’hui important de bien intégrer l’ensemble des partenaires aux échanges et avancées globales du projet "MaaS" pour faire en sorte que chacun comprenne bien le cadre stratégique et politique souhaité.


Quel dispositif de gestion de la relation usagers avez-vous mis en place dans le cadre du déploiement de votre plateforme ? Quels enjeux associés ?


Du coté de la Métropole Rouen Normandie, la gestion de la relation usager repose sur des canaux webs et téléphoniques organisés entre l’opérateur de la plateforme MaaS et les opérateurs de mobilité partenaires ; transport en commun, TAD, taxis… avec une hotline et une plateforme web de contact de 1er niveau. 
Mais il y a également une hotline pour chaque service de mobilité ; ce qui peut effectivement parfois induire en erreur les usagers. 

Dans une approche assez similaire, le système gestion de la relation usagers déployé par Métropole Montpelier Méditerranée s’appuie sur la SPL TAM pour les sujets liés à l’usage du service numérique et des services de transport dont elle a la responsabilité. Les questions en lien avec les services externes (ex : borne de recharge) sont orientées vers l’opérateur du service.

Dans ce contexte, pour une difficulté rencontrée par un usager, il n’est parfois pas évident d’identifier simplement si cela relève de la plateforme numérique ou du service de mobilité auquel la plateforme permet d’avoir accès. Cela soulève ainsi l’enjeu d’une étroite coordination entre acteurs pour la gestion opérationnelle de la relation usagers ainsi qu’un enjeu de formation. La question de la centralisation de la relation usagers peut par ailleurs se poser dans le cadre de renouvellement de marchés.


Quels sont les enjeux associés au management organisationnel et à la gestion des compétences au sein d’un tel projet ? 


La gestion du projet au sein d’une AOM repose souvent sur un seul chef de projet. Au regard des différentes dimensions à traiter dans le cadre d’un tel projet, cela peut s’avérer parfois compliqué. Un projet « MaaS » demande des expertises distinctes (en politique de mobilités, en numérique/informatique, certes ... mais aussi en marketing, juridique, design…) qu’il est parfois difficile de mobiliser en interne. 
Par exemple, pour la Métropole Rouen Normandie, le traitement des enjeux liés au RGPD (gestion des données personnelles) a nécessité de mobiliser une expertise spécifique en externe.  Dans ce contexte , l’organisation d’une collaboration étroite avec l’opérateur technique de la plateforme est importante pour suppléer à ces difficultés. 

Il y a également un enjeu d’acculturation interne à la collectivité pour intégrer le fait qu’un projet « MaaS » est bien plus qu’un projet technique.  Il doit s’intégrer comme un véritable projet de politique et service public de mobilité.

👉Interopérabilité : projets régionaux et nationaux accélérateurs de la standardisation !

Echanges entre Ghislain Delabie, directeur de projet à la Fabrique des Mobilités, Claire Heidsiek, Directrice Territoires Innovation et Nouvelles Mobilités à la région Grand-Est, Maxime Siret Intrapreneur – Chef de produit numérique transport.data.gouv.fr, et Jorge Gonzalez, Responsable d'études Systèmes d'information des services de mobilité à la DGITM.

Ghislain Delabie a introduit la discussion avec un rappel de quelques enjeux liés au développement de l’interopérabilité des systèmes numériques de mobilités/MaaS : 

L’interopérabilité des systèmes constitue un enjeu pour le passage à l’échelle des systèmes déployés à l'échelle locale, régionale ou nationale. L’interopérabilité constitue certainement un facteur clé pour que les projets soient économiquement rentables pour les industriels et viables pour les collectivités et opérateurs de transports et services de mobilité.

Cette interopérabilité repose sur des standards établis, adoptés par les parties prenantes.

Ces standards présentent des niveaux de maturité et d’adoption différents selon qu’il s’agit de standards pour l’information voyageurs ou de standard transactionnels (permettant l’achat ou l’usage d’un service de mobilité).

Les standards ont besoin de projets concrets et d’ampleur pour “tirer l’adoption et la maturité” : plus que des GT, il faut des déploiements en conditions réelles qui génèrent du feedback, des améliorations, et qui entraînent des acteurs à adopter / se rapprocher des standards par effet réseau.

Pour en savoir plus sur les standards de la mobilité, consultez le baromètre des standards de la mobilité 2024 de la Fabriques des Mobilités.

Suite à cette introduction Claire Heidsiek est intervenue pour présenter l'approche de la Région Grand-Est : 

logo région Grand-Est

L'interopérabilité vise à répondre aux usagers de plus en plus nombreux qui ont besoin, pour un déplacement, de naviguer entre plusieurs formes de mobilité, avec plusieurs modes, sur plusieurs réseaux. L’enjeu est ainsi de leur faciliter le déplacement.

La complexité liée à l’accès à l’information, l’achat de titre, sa validation, son contrôle… doit être absorbée par les institutions et non par les usagers.

L’absorption de cette complexité entre AOM/opérateurs constitue ainsi l’objectif clé de l’interopérabilité.

La région, en tant que chef de fil des mobilités a donc la responsabilité légitime de coordination entre acteurs pour permettre de rendre interopérables les systèmes, au-delà des frontières administratives, techniques et de process.

Dans ce contexte, il y a nécessité de déployer des outils à l’échelle régionale, tant dans une logique d’optimisation des fonds publics utilisés, que pour s’appuyer sur des briques techniques rendant interopérables les systèmes locaux et régionaux.

La plateforme de génération de code-barres 2D (CB2D) est un projet développé depuis 2018 par la Région Grand-Est en ce sens.

Au regard d’intégrations tarifaires mises en œuvre avec certaines agglomérations et métropoles, est née la volonté collective de travailler sur un produit commun permettant de générer un même titre pouvant être lu sur plusieurs réseaux.

En lien avec les travaux de normalisation en cours, la région a mobilisé Wordline, via un marché, pour une mise en production de la plateforme CB2D en 2022.

Aujourd’hui, quatre réseaux utilisent la plateforme CB2D, dont la Métropole de Strasbourg et Mulhouse-Alsace Agglomération avec en 2024 : 2,2 millions de code-barres générés.

Cette plateforme CB2D s’intègre pleinement dans l’esprit et la dynamique du projet de titre unique de transport portée par la DGTIM, car constitue une brique permettant de « parler le même langage » entre systèmes, dans une dimension inter-régionale.

En complément, Claire Heidsiek indique qu’une vingtaine de réseaux du territoire régional utilisent le calculateur d’itinéraire régional,  14 réseaux utilisent la carte billettique Simplicités, témoignant de la dynamique de mutualisation de briques techniques à l’échelle régionale.

Maxime Siret a ensuite rappelé le travail porté par la DGITM sur le point d’accès national avec transport.data.gouv.fr

logo PAN

transport.data.gouv.fr est la plateforme nationale de données entre des producteurs (autorités organisatrices de la mobilité, opérateurs de transport, systèmes d’aide à l’exploitation, gestionnaires d’infrastructures) et des réutilisateurs (services numériques d’information voyageurs). La valeur ajoutée de ce point d'accès national (PAN) repose nécessairement sur des formats de données standardisés et interopérables. 

Un des enjeux pour une information voyageur enrichie est de pouvoir s’appuyer sur des données de qualité, aux formats standardisés, intégrant le temps réel, les informations d’accessibilité, les informations tarifaires, …

De manière concrète, le PAN mène actuellement différents travaux sur le sujet de la standardisation comme notamment celui sur le registre de points d’arrêt de transport, dont l’objet est de pouvoir référencer de manière unifiée l’ensemble des points d’arrêts présents sur le territoire national.

Dans ce cadre, l’enjeu est de pouvoir garantir une interopérabilité de données à l’échelle nationale à partir d’une collaboration avec producteurs de données locales, régionales et les ré utilisateurs.

Claire Heidsiek précise que la région Grand-Est administre un référentiel de données régionales, et se trouve être ainsi agrégateur de données locales et potentiellement livreur de données au PAN pour les petites AOM n’ayant pas les moyens de verser directement leurs données. 

Jorge Gonzalez mentionne que le développement de briques techniques mutualisées et interopérables, basées sur des standards constitue un enjeu à l’échelle nationale comme européenne. A l’échelle européenne la directive ITS et 2 règlements délégués fixent un cadre tant sur la partie information- voyageurs que pour la distribution de titres de transports, cadre repris en France à travers la LOM (article 25 et 28).

Dans ce cadre réglementaire, l’intégration de données au format Netex constitue aujourd’hui encore un enjeu pour les producteurs de données comme pour les ré-utilisateurs. 

Conscient de la complexité de son implémentation, Transport.data.gouv.fr organisera notamment le 8 avril 2025 une formation sur le format NeTEx. 

Jorge Gonzalez a ensuite présenté le projet de plateforme nationale d’interopérabilité prévue dans le cadre du projet Titre Unique de Transport porté par la DGITM :

La plateforme nationale d’interopérabilité (PNI)  a pour objet de permettre aux AOM et autres gestionnaires de service s’y connectant, et devenant de ce fait partenaires, d’ouvrir leurs produits tarifaires à la délivrance au sens de l’article 28 de la LOM. 
Tous les fournisseurs d’applications mobiles destinées à la mobilité, y compris les AOM, bénéficieront ainsi de la capacité technique à délivrer sur leurs médias les produits tarifaires de tous les gestionnaires de service partenaires, permettant aux usagers de profiter de la même expérience digitale quel que soit le service emprunté.

 

Schéma de représentation du titre unique

Cette plateforme nationale d’interopérabilité s’appuiera : 

  • La plateforme de génération de CB2D préalablement développée en Grand-Est
  • Une API – transport public standardisée sur la base des travaux du GT6 de la CN03 /BTRNA visant la standardisation des processus d’achat de titres (en prépaiement comme en post-paiement), dans le transport en commun.

Le projet Titre unique, entrant en phase de développement et expérimentation en 2025,  devrait ainsi permettre de déployer des outils standardisés d’interopérabilité et alimenter/affiner les travaux de normalisation par une preuve de concept.

Jorge Gonzalez a enfin indiqué en complément que Régions de France, en partenariat avec la DGITM, lancera en 2025 une étude des conditions d’inter-régionalité des plateformes MaaS régionales.